Préconisations pour la méthanisation

Mis à jour le 06/11/2018

L'action du comité départemental pour le développement des énergies renouvelables dans l'Eure s’inscrit dans la démarche nationale de mutation de notre système de production d’énergie. Son action doit contribuer notamment au Plan climat présenté en juillet 2017 par Nicolas Hulot. Ce plan climat fixe une ambition : viser la neutralité carbone à l’horizon 2050. Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement entend accélérer la montée en puissance des énergies renouvelables et la diversification du mix énergétique au cours des prochaines années. Afin de faciliter l’émergence des nouveaux projets et leur financement, le volet agricole du Grand plan d’investissement ouvre des possibilités de prêts sans garantie dédiées aux projets de méthanisation agricole.

Pour impulser une dynamique locale de développement de la méthanisation, le comité des énergies renouvelables a pour objectif d’accompagner les porteurs (publics comme privés) de projets dans leurs démarches, sans se substituer à l’accompagnement par un bureau d’étude ou à l’instruction par les services correspondants.

Il s’agit notamment d’aider à la prise en compte, en amont du projet, de l’ensemble des paramètres favorisant la réussite de ce projet : délais, procédures, vision globale, adhésion des riverains au projet, etc.

Concernant le lien avec les riverains, il est essentiel pour le comité des énergies renouvelables que l’ensemble du contexte territorial du projet soit examiné suffisamment en amont pour permettre une meilleure adhésion des citoyens aux projets de méthanisation.

Le comité émet donc ci-après plusieurs préconisations pour un développement durable et cohérent de ces projets sur le territoire eurois.

Priorités données par le comité des énergies renouvelables

Au vu du diagnostic territorial, les priorités du comité des énergies renouvelables sont les suivantes :

  • dans le cadre de la multifonctionnalité de l’agriculture (production alimentaire, production économique, production de biomasse, contribution à la biodiversité, à l’aménagement du territoire, ...), les unités de méthanisation agricole connexes à l'élevage sont privilégiées ;
  • dans l'objectif d’assurer les débouchés et la gestion professionnelle des unités de méthanisation agricole, les unités de méthanisation agricole collectives présentent un intérêt déterminant ;
  • toujours dans une logique de multifonctionnalité des exploitations agricoles et de diversification des activités, il est pertinent de développer une filière de méthanisation agricole à partir de, cultures intermédiaires dans le cadre des préconisations définies par le comité des énergies renouvelables ;
  • les projets d'injection de biogaz dans le réseau de distribution sont à privilégier : il s’agit de mutualiser les projets pour optimiser le réseau. Les solutions alternatives telles que les modules de transports déportés pourront être envisagés lorsque le réseau n'existe pas ou qu'il est très coûteux de s’y raccorder ;
  • afin d’ancrer territorialement et de renforcer la durabilité des méthaniseurs, il est essentiel que les intrants alimentant le méthaniseur se trouvent à proximité et que les digestats soient épandus localement ;
  • en ce qui concerne les intrants, il importe que la ration du méthaniseur soit cohérente, pérenne  et stabilisée, en particulier sur le plan biologique ;
  • il est également important de veiller à ce que le stockage, les manipulations et tous les flux liés à ces intrants ne génèrent pas de nuisances permanentes ou excessives.

Préconisations du comité des énergies renouvelables pour une intégration du projet de méthanisation dans son environnement

Le porteur de projet est invité à se rapprocher du comité et à être attentif aux éléments suivants :

  • la localisation de l’unité et l’implantation de ses éléments ;
  • établir un plan de communication avant, pendant et après l’installation de l’unité de méthanisation, notamment en prévoyant une concertation préalable avec le voisinage pour une meilleure adhésion au projet par les riverains ;
  • prévoir une insertion paysagère et architecturale du méthaniseur ;
  • assurer une bonne gestion du digestat ;
  • se professionnaliser pour une maintenance durable du méthaniseur ;
  • l’intérêt économique du projet et des retours sur investissement ;
  • anticiper les démarches qui doivent être initiées très en amont, en particulier celles concernant l’urbanisme ou l’utilisation de sous-produits animaux ;
Localisation du projet

Même en milieu rural, le porteur de projet devra être attentif :

  • à la distance entre le projet et les habitations avoisinantes pour éviter les conflits de voisinage et les conflits d’usage de la route ; le comité recommande la recherche d’une distance optimale assurant un équilibre entre la réduction des nuisances et l’accès au point d’injection ;
  • aux effets cumulatifs de l’existence de plusieurs unités dans une zone restreinte ;
  • à l’absence de concurrence entre les gisements sollicités pour approvisionner les unités de production ;
  • aux capacités, à la proximité des réseaux routiers et à la sécurisation des accès ;
  • aux distances parcourues pour l’approvisionnement et pour l’épandage ;
  • à la possible évolution de l’activité de méthanisation ou de l’exploitation sans remettre en cause notamment les distances entre habitations et installations ;
Plan de communication

Il est indispensable pour le comité des énergies renouvelables que le porteur de projet prévoit un plan de communication. Ce plan est en effet essentiel pour mieux faire comprendre le processus de méthanisation et les métiers qui y sont liés. Ce plan doit être à destination de tous les riverains. Il s’agit de créer un climat de confiance et un dialogue entre le porteur de projet et les riverains pour un projet qui respecte les besoins des uns et des autres.

Ce plan de communication comprenant a minima des actions de communication et d’information permet une meilleure adhésion au projet et favorise son insertion sociétale locale.

Ces actions de communications doivent être envisagées :

1) en amont du projet :

  • informer le maire, puis les riverains bien avant que la rumeur de l’installation du projet ne coure ;
  • communiquer sur les odorants et les mesures afférentes : absence d’odeurs supplémentaires par rapport à une activité agricole quand le projet est maîtrisé, maîtrise des odeurs grâce à un suivi de performance des opérations et/ou la mise en place d’un suivi (nez électronique), etc. ;
  • communiquer sur le fait que des odeurs « supplémentaires » peuvent apparaître pendant des périodes temporaires spécifiques : nettoyage des appareils, de la fosse, etc ;
  • communiquer sur les transports et leurs flux ;
  • communiquer sur les bénéfices du retour au sol (diminution des apports en engrais chimiques, valorisation des sols…).

2) pendant la construction du projet et jusqu’à la finalisation du projet :

  • communiquer sur l’avancée du projet ;
  • suggestion : inviter à une visite du méthaniseur.

3) pendant la période d’exploitation :

  • informer à l’avance les voisins/habitants des périodes d’odeurs plus fortes, de transports et flux particuliers (voir « Petit guide du bon voisinage » et «  Charte du bon voisinage » disponibles auprès de la chambre d’agriculture de l’Eure)
  • offrir un échange de « bons procédés » avec le voisinage immédiat : par exemple en acceptant les tontes de pelouse pour les recettes végétales ;
  • être transparent sur les évolutions de capacités envisagées, en particulier en termes de volume d’intrants et de trafic induit.
Insertion paysagère et architecturale des installations

Le porteur de projet doit être attentif à l’insertion paysagère et architecturale de son méthaniseur dans l’objectif de limiter l’impact visuel du projet (inclusion au paysage, au village etc).

Le comité des énergies renouvelables insiste notamment sur la nécessité de :

  • organiser les bâtiments de façon rationnelle pour former un bâti compact et fonctionnel permettant les manœuvres des engins et limitant l’emprise au sol des bâtiments pour réduire l’imperméabilisation des sols ;
  • limiter l’impact de la hauteur des installations (création de bâtiments / cuves semi-enterrées…) et privilégier des formes classiques ;
  • utiliser des couleurs et des tons « ruraux » (bois, vert foncé, gris clair) et limiter l’alternance de couleurs et de matériaux ;
  • utiliser ou créer des haies pluristratifiées ou des haies bocagères avec des essences locales ;
  • éviter une installation en espace ouvert ;
  • privilégier l’étanchéification des zones de dépôts et de transfert, notamment pour éviter les reprises des intrants et d’effluents qui sont générateurs d’odeurs.
  • lorsque le projet se situe dans le périmètre d’un espace protégé (site inscrit ou classé, abords de monuments historiques), prendre contact avec l’unité départementale de l’architecture et du patrimoine afin d’obtenir des éléments de cadrage précis. Pour les autres zones, prendre contact avec les architectes-paysagistes conseils de la Direction départementale des territoires et de la mer. Le pétitionnaire peut également prendre contact avec le Conseil d'architecture, d'urbanisme et de l’environnement de l'Eure (CAUE - Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement 27).
Gestion du digestat

Il est impératif de veiller à la qualité agronomique du digestat pour protéger les sols. Il est rappelé que la qualité du digestat dépend moins de la technologie employée que de la qualité et de la constance des produits entrants dans le processus de méthanisation.

Il convient de favoriser les techniques d’épandage les plus adaptées pour permettre la réduction des émissions de gaz à effet de serre et autres polluants atmosphériques : choisir la bonne période pour épandre soit au plus près des besoins de la plante, après les pluies pour éviter le lessivage, etc.

Le matériel adéquat devra être prévu pour le traitement en azote des sols.

Etre un professionnel de la méthanisation

Le comité des énergies renouvelables réaffirme que la gestion d’une unité de méthanisation est un métier à part entière et qu’il doit faire l’objet d’une professionnalisation du porteur de projet.

Le porteur de projet devra apporter les éléments démontrant :

  • le cas échéant, le lien entre le méthaniseur et son activité agricole ;
  • la connaissance de la réglementation de base et la maîtrise des processus biologiques ou les moyens de l’assurer ;
  • la rigueur prévisible dans la gestion de l'unité de méthanisation, notamment par la mise en place d’outils de gestion et de suivi d’exploitation : contrat de maintenance, suivi du processus (auto surveillance, tableau du suivi des points de contrôle et moment de contrôle, mise en place d’un nez olfactif, …) ;
  • sa professionnalisation : temps de travail consacré à l’exploitation de l’unité de méthanisation, création d’un poste salarié dédié, charge de travail à plein temps pour l’un associé, plan de formations (biologies, techniques pour le procédé de méthanisation et pour l’épandage du digestat) ou réunions techniques, connaissance des procédures administratives, etc ;
  • la mise en place d’un système assurant la propreté et l’entretien des camions ou tracteurs d’approvisionnement et d’épandage notamment pour éviter les rejets sur la route ;
  • la gestion des odorants (stockage minimisant les odeurs, : poche à lisier, hangar fermé, etc), l’identification de toutes les sources de libération d’odeurs dans la chaîne du procédé et les moyens d’action correspondants ;
Intérêt économique et retour sur investissements

L'investissement de départ étant important, le projet doit obligatoirement s’inscrire sur le long terme. La fiabilité du projet repose largement sur l'étude initiale : le porteur de projet doit avoir une vision claire et précise des intrants sans que le méthaniseur qui ne se transforme en fourre-tout dans le futur. Par ailleurs, les résultats économiques sont largement dépendants de la rigueur et de la technicité. L’exploitation d’un méthaniseur doit donc être considéré comme une activité économique à part entière.

L’intérêt économique peut également être envisagé par la mise en place d’un projet partagé avec la collectivité locale ou un collectif d’agriculteurs, par exemple par la création d’une structure juridique adéquate.

Financement participatif

Le comité des énergies constate que l’implication de citoyens dans la gouvernance et/ou le financement de projets de production d’énergies renouvelables (éolien, méthanisation) permet de constituer une communauté de soutiens engagée auprès du porteur de projet et de participer en tant que citoyen au développement du territoire.