Déléstages électriques : quelles conséquences pour votre entreprise ?

Mis à jour le 13/01/2023

Le délestage: quoi et comment?

Afin de soulager le réseau de distribution d’électricité dans un contexte de forte consommation hivernale et de sous-production électrique liée à l’arrêt pour maintenance d’une part importante du parc nucléaire, l’opérateur RTE est susceptible de procéder à des délestages.

Ce délestage prendra la forme d’une coupure d’alimentation électrique de votre entreprise programmée en semainepour une durée estimée dedeux heures comprises entre 8h00 et 13h00 heures et/ou entre 18h00 et 20h00.

La veille d’un délestage, des messages d’information seront diffusés aux alentours de 17h00.

Il vous sera possible de vérifier sur le site https://www.monecowatt.fr/ si votre rue est concernée.

Conséquence du délestage sur la relation de travail

Les salariés des entreprises délestées sont susceptibles de ne pouvoir accomplir leur mission pendant au moins deux heures.

Les entreprises pourront mettre en œuvre les mesures suivantes, par ordre de priorité :

Recours au télétravail :

Les entreprises devront privilégier le télétravail quand celui-ci est possible, pour la journée au cours de laquelle un délestage est annoncé.

A l’inverse, le salarié qui devait télétravailler un jour où son domicile fait l’objet d’un délestage sera invité à se rendre en entreprise.

Récupération des heures perdues :

Les heures non travaillées en raison du délestage peuvent être récupérées ultérieurement en application de l’article L. 3121-50 du code du travail.

La récupération des heures perdues peut ne concerner qu’un service ou une équipe de l’entreprise. En revanche elle doit viser tous les salariés concernés par l’interruption. A défaut d'accord collectif prévoyant des modalités différentes, les heures ne pourront être récupérées que dans les 12 mois suivant le délestage. Elles ne peuvent augmenter la durée du travail de l'établissement de plus d'une heure par jour et 8 heures par semaine. L’entreprise doit informer préalablement l’inspecteur/l’inspectrice du travail territorialement compétent(e) de l’interruption du travail et des modalités de la récupération.

Les heures ainsi récupérées ne constituent pas des heures supplémentaires.

La récupération des heures perdues est un dispositif légal qui permet à l’employeur de reporter l'exécution des heures de travail qui n’ont pu être effectuées pour des motifs limitatifs prévus par la loi dont celui de la force majeure.

Les entreprises peuvent–elles imposer à leurs salariés de ne pas se rendre dans l’entreprise ou de quitter leur poste de travail et donc de reporter les heures de travail en dehors du dispositif de récupération des heures perdues ?
  • En l’absence d’accord d’aménagement du temps de travail : l’employeur est tenu de rémunérer les heures qu’aurait dû faire le salarié conformément au contrat de travail sans pouvoir les reporter.
  • En présence d’accord d’aménagement du temps de travail : l’employeur doit respecter le délai de prévenance prévu par l’accord. Dans le silence de l’accord, le délai de prévenance est de 7 jours minimum.
  • En présence d’accord sur le télétravail : si la zone impactée par la coupure d’électricité concerne uniquement le lieu de travail et non le domicile, l’employeur peut demander au salarié de télétravailler le temps du délestage.
Activité partielle :

Si l’activité de votre entreprise n’est pas télétravaillable et si la récupération des heures perdues est impossible, une demande d’autorisation d’activité partielle pourra être présentée en dernier recours dans un délai maximum de 30 jours à compter de l’interruption d’activité.

Les heures indemnisées seront celles correspondant à la durée du délestage et éventuellement du temps nécessaire au redémarrage de l’activité.

Les demandes devront être effectuées sur le site :

https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/ en sélectionnant le motif « toutes autres circonstances exceptionnelles »et le sous-motif « délestage ».

L’utilisation de ce motif autorise les entreprises à bénéficier de la souplesse prévue à l’article R. 5122-3 du code du travail permettant à l’employeur de disposer d’un délai de trente jours à compter du placement des salariés en activité partielle pour adresser sa demande préalable. Le salarié percevra dans ce cas une indemnité au taux de droit commun, soit 60 % de sa rémunération brute antérieure, dans la limite de 60 % de 4,5 Smic. L’employeur recevra de l’Agence de services et de paiement (ASP) une allocation d’activité partielle équivalente à 36 % de la rémunération brute antérieure du salarié, dans la limite de 36 % de 4,5 Smic, avec un plancher de 7,88 euros.

Concernant le dispositif d’activité partielle vous pouvez consulter le question/réponse du ministère chargé du Travail :

https://travail-emploi.gouv.fr/emploi-et-insertion/accompagnement-des-mutations-economiques/activite-partielle-chomage-partiel/article/questions- reponses-ap-apld-dans-le-contexte-du-conflit-en-ukraine

Attention : les salariés qui doivent garder leur enfant dont l’école est fermée en raison d’un délestage ne peuvent être placés en activité partielle.

École fermée

Si l’école de l’enfant est fermée le parent doit soit trouver une solution de garde, soit poser un jour de congé ou de RTT Réduction du temps de travail la demi-journée durant laquelle l’établissement scolaire ne pourra pas recevoir d’élèves. Il peut également poser un jour de garde d’enfant si ce dispositif existe dans la convention collective ou l’accord d’entreprise.

Sur la possibilité d’assimiler les baisses de tension / coupures d’énergie à un cas de « force majeure »:

En l’absence de définition de la notion de force majeure par le Code du travail, la circulaire DRT n° 94/4 du 21 avril 1994 donne deux exemples d’évènements pouvant constituer un cas de « force majeure » qui se rapprochent de la situation de délestage :

  • les accidents survenant aux installations suite à une grève d'EDF ;
  • la pénurie de matières premières.

Les baisses de tension/coupures d’énergie peuvent recouper ces deux exemples puisqu’elles affectent l’approvisionnement qui est indispensable à la poursuite de l’activité.

Au-delà des exemples donnés par la circulaire, la jurisprudence de la Cour de cassation a posé cinq critères caractérisant la force majeure : il doit s’agir d’un événement extérieur, imprévisible, irrésistible, inévitable et insurmontable.

Dans le cas d’une baisse de tension ou coupure d’énergie, il s’agit bien d’un évènement :

  • extérieur à l’entreprise ;
  • imprévisible : les conséquences de la situation géopolitique n’étaient pas prévisibles et l’effectivité des coupures est inconnue à ce jour ;
  • irrésistible, inévitable et insurmontable : la dépendance à la ressource énergétique dans l’industrie remplit ces trois critères, sous réserve que les baisses de tension soient de nature à empêcher l’activité compte tenu notamment de l’autonomie relative déclarée, des besoins réels pour le type de production, mais également des durées réelles de baisse de tension.

Si les conditions paraissent remplies en théorie pour recueillir la qualification de force majeure, la capacité de l’entreprise à poursuivre son activité en cas de baisse de tension devra être appréciée concrètement notamment en fonction des moyens propres de production d’énergie dont elle dispose.

Il appartient à l’employeur d’apprécier le bien-fondé du recours à la récupération des heures perdues et d’en justifier l’usage auprès du juge, si elle était contestée.

La récupération des heures perdues permet à l’employeur de reporter l'exécution des heures de travail qui n’ont pu être effectuées en cas de force majeure (Cf. : détail du dispositif supra).

Obligations de l’employeur en matière de sécurité et de protection de la santé des salariés :

L'employeur doit veiller à la santé et à la sécurité de ses salariés.

Pour remplir cette obligation, il doit évaluer les risques qui pourraient être engendrés par les coupures de courant :

  • arrêts des dispositifs de sécurité ;
  • arrêt des systèmes de communication ;
  • risques liés aux équipements de remplacement (groupes électrogènes, etc.) ;
  • risques d’intrusion ;
  • etc.

Cette évaluation doit comporter un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise ou de l'établissement et a pour objectif la mise en place d'actions de prévention et d'amélioration des conditions de travail.

Les résultats de cette évaluation et les actions à mettre en oeuvre sont reportés dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) qui devra être mis à jour et porté à la connaissance des salariés.

Pour toute précision vous pouvez solliciter :

Pour toute demande relative à l’activité partielle vous pouvez écrire à l’adresse ddets-activite-partielle@ eure .gouv.fr